l’Elena

De l’gui

La voix de Louis se remémorant la colline aux myrtilles, agissait comme un baume sur mon poignet. Malgré la douleur, je parvenais à garder le rythme, mais tout mon bras se raidissait.

  • Sois souple, léger. Me disait-elle.
  • Mais pourquoi t’achètes pas un batteur? C’est une plaie de faire ça à la main!

Avec un léger rictus au coin de l’œil:

  • J’ai un batteur… Mais il ne bat pas aussi voluptueusement que toi. Figure-toi que tu fabriques un nuage…
  • T’en as un?
  • Pardon?
  • Un batteur! T’en as un!?
  • S’il-te-plaît ne sois pas stupide. C’est le processus, le plaisir qui importe. Le plaisir importe beaucoup! Il emporte tout, tu sais. Puis comme pour reprendre sa respiration, elle leva les yeux au ciel.

Le plaisir… Je voulais me plaindre, mais je n’osais plus. Je me contentai de lever à mon tour, les yeux au ciel, mais mon regard s’arrêta au plafond. C’était… C’était dégueulasse! Une constellation de taches, d’auréoles, de moisissures, qui se superposaient.  La somme de ces couleurs invraisemblables se confondait en une teinte violacée et profonde, se déclinant de l’aubergine au parme en passant par le pourpre ou le prune. C’était une fresque, une huile, lourde, et vertigineuse. D’abyssales lézardes la traversaient de part en part, formant de menaçantes plaques de peintures. Comme autant de morceaux de ciel n’attendant qu’une légère brise pour s’abattre ici bas.

  • Nous t’avons perdu? Oui c’est… C’est lamentable. Je te prie de m’en excuser. Je devrais être honteuse de t’accueillir dans de pareilles conditions. Mais tu me connais, je ne suis pas procédurière et la seule idée de contacter le propriétaire me donne la nausée. Par ailleurs tu sais mon goût pour tout ce qui est, un peu émoussé… (se penchant sur mon saladier) Ils ont l’air bien. Continue!

Sorti de mon état contemplatif, mon corps las se rappelait à moi dans une vivifiante douleur. Elle s’assit face à moi ; le dos droit, ses paumes posées sur ses cuisses elle me regardait.

  • Tu es beau dans l’effort. Tes avant-bras surtout. Elle se pencha et vint, à deux mains me saisir. Entre ses serres, mon bras vigoureux  n’esquissait plus que quelques soubresauts. Ils sont extraordinaires, c’est invraisemblable que tu aies des avant-bras pareils.

Elle me lâcha, se redressa, me sourit, vida son verre de vin, le remplit, compléta généreusement le mien, se leva et la coupe à la main, quitta la pièce. Nous buvions, dans de hauts et larges verres un Côte de Nuits – Fixin Clos Marion 2005. Et franchement il était très bien.  D’aussi loin que je me souvienne, Maria m’avait toujours reçu avec des honneurs qu’il me semblait usurper. Élégante dans le moindre de ses soupirs, sa seule présence, son amitié pour moi, me faisaient me sentir, au préambule de nos entretiens, indigne. Indigne de cette grâce et de ses égards. Heureusement pour moi, mon ego ainsi flatté s’y accoutumait rapidement, et de chacune de nos entrevues, je sortais fier et apaisé. C’était aussi dans cet intérêt que j’étais venu ce soir. J’espérais emporter avec moi un peu de son élégance.

Tandis qu’elle tardait à réapparaître, je battais et battais encore. Le fracas de mon fouet, emplissait la petite cuisine. Les aigus amplifiés dans le pavillon du cul de poule claquaient le Formica du mobilier. La table, les chaises, le buffet fourmillaient sous les assauts obstinés de l’onde qui nourrissait leurs couleurs pétrolifères avant de heurter les murs, s’y propager et finir absorbée dans les profondeurs célestes. Les blancs devenaient de plus en plus denses, le son s’enrobait, s’étoffait, comme si l’atmosphère s’épaississait avec eux. Bientôt, le tapage de mon balai n’était plus qu’un grondement sourd et gras, enveloppant tout, recouvrant tout. L’air devenu aqueux, transportait  les vibrations à la surface de ma peau. Mes pieds, jusque-là sûrement agrippés aux tomettes, semblaient alors s’enfoncer dans la  mosaïque de coussinets hexagonaux.

  • Je pense que c’est bon là !  Vociférai-je en direction de la porte derrière moi.

Mais ma voix absorbée dans l’esclandre ne savait plus l’atteindre. Mon bras battait maintenant librement, sans qu’il me sembla encore le contrôler. Avec une légèreté qui m’était inconnue, l’écume éclatante s’enroula sur mon moussoir pour s’élever lentement dans les airs. Le grondement gras s’apaisa jusqu’à ne plus être qu’un murmure.  Du bout de ma trique je suivis l’incroyable ascension tant que je pus. Une fois leur lente progression stoppée par la matérialité du tout puissant, tout était redevenu calme, et on pouvait écouter Ella se plaindre des nuages. Je me rassis et contemplai mon oeuvre. Alors j’entendis sonner les talons de Maria sur le carmin géométrique qui avait retrouvé toute sa sécheresse. Elle entra et s’arrêta à ma hauteur. Elle vacillait légèrement. Elle observa mon nuage taquiner les lézardes du ciel pourpre et but une large gorgée de vin.

  • C’est parfait. En général les hommes, vous êtes assez bons pour ce genre de choses.
  • Pour quoi?
  • Les nuages…
  • Non… Pourquoi plus les mecs que les femmes?
  • L’entraînement je suppose mais surtout cette manière opiniâtre de vouloir affirmer votre virilité.

Mes ustensiles encore en main, je cherchai à discuter son analyse, mais elle ne m’en laissa pas le temps.

  • Et ta virilité justement, comment se porte-t-elle?
  • ..?
  • Pardonne moi. J’entends tes amours, comment vont-ils?
  • Pas de vulgarité princesse! (Je déposai les armes, saisis mon verre et de son rubis me rinçai la bouche) D’un point de vu sentimental j’suis toujours frigide. C’est parce que j’me laisse pas aller au transport, on est d’accord. Enfin, la dernière fois que j’me suis laissé emporter, j’suis revenu trois ans plus tard avec l’anus façon canal du Panama et comme un goût de merde au niveau des amygdales. (Me palpant la gorge) Alors c’est sûr, j’suis devenu un peu craintif. Rappelle-toi, j’ai encore la marque des bracelets… (Reprenant une gorgée de vin) J’ai des aventures, tu t’en doutes. Mais j’propose que des contrats de merde. Au mieux un CDD d’quelques mois. Et la plupart du temps, c’est d’la vacation. Alors c’est sûr y a beaucoup d’turnover, avec le grand-huit émotionnel que ça implique. Mais j’suis pas encore prêt à rempiler sur un CDI. Après tu m’connais, j’suis un coeur d’artichaut. En proie à des pulsions, des transports. Mais tout aussi intenses que furtifs. (Après un temps) Parfois j’me vois comme un pyromane. J’allume des foyers un peu partout. J’les laisse s’éteindre, puis quand ils agonisent, je reviens souffler sur les braises. À croire que c’que j’aime par dessus tout, c’est foutre le feu. D’le faire prendre, puis reprendre, et reprendre encore ; jusqu’à c’qu’y ait plus rien à cramer. (Je vidai mon verre et me resservis) Alors effondré, désespéré, après avoir inondé les cendres en pleurant sur mon massacre, j’allume de nouveaux foyers… Et un instant encore, j’me réchauffe l’coeur… J’sais vraiment pas quoi faire de moi. 

Alors que le King s’était fait loup pour prier la lune, Maria écoutait, sans dire un mot. Je bus, elle but, nous bûmes et je bavai. Après m’être essuyé le menton du revers de ma manche, je continuai en ces termes:

  • Mais en vérité c’qui m’chagrine en c’moment, c’est qu’j’ai plus la classe. C’est comme si j’arrivais plus à toucher l’élégance. Je sais que j’ai jamais été d’un raffinement extravagant! Mais j’arrivais à être charmant, parfois. Et bah là j’y arrive plus! C’est comme si j’étais enduit d’erreur. Poisseux comme une marée noire. Les oiseaux rares qui s’y aventurent s’empêtrent inévitablement. J’suis lourd. Ma peaux est lourde, et suintante. J’arrive pas à me débarrasser de cette poisse qui m’recouvre. J’aimerais tant retrouver un peu de légèreté.

Après un temps, je tentai de retrouver l’inspiration dans la contenance de mon ballon. Ne sachant définitivement plus quoi dire, je me tus et re-bus. Maria me regardait. Puis, elle se leva et comme pour me rassurer, elle me dit:

  • Je reviens.

Pendant son absence, je fixais impassiblement mon verre essayant d’en distinguer le fond à travers le tanin. Au fur et à mesure que mon regard s’enivrait, les fumées de l’alcool parcouraient mon visage. Comme tout devenait pourpre je plongeai.

Elle réapparut quelques instants plus tard et vînt s’asseoir face à moi. Au creux de ses mains jointes, elle découvrit lentement, une petite ogive nacrée.

  • Qu’est-ce que c’est?
  • Ceci mon cher, est un oeuf d’Elena!
  • Un «Elena»?!
  • C’est un colibri. Le plus petit oiseau du monde! Et ce n’est pas sa seule particularité… Regarde, je vais te montrer.

Elle saisit l’oeuf entre le pouce et l’index, elle le fit rouler de manière à ce que celui-ci paraisse complètement immobile. Ainsi figé dans l’espace elle le caressa de chacune de ses phalanges, puis de l’extrémité de ses doigts. Glissant à sa surface, ses mains étaient comme deux danseuses se partageant une toute petite planète.

À l’issue de la pièce, Maria prit ma main et déposa dans son creux le bijou.

  • Essaie!

Je saisis le précieux et peu convaincu, tentai d’imiter mon hôte. Mes doigts trébuchèrent sur l’oeuf qui faillit m’échapper.

  • C’est super dur! J’peux pas faire ça moi.
  • Avec un peu de temps, tu y arriveras. Essaye de ne pas le secouer, tes doigts doivent s’enrouler autour. Doucement, concentre toi.

Je maltraitais encore un peu le pauvre Elena.

  • Je te l’offre. Garde le, et lorsque tu auras bien ramolli la coquille, il pourra éclore.

A ce moment je compris qu’il n’était plus question de raisonner. Malgré mon application, le résultat restait peu probant. Déjà un peu las de pétrir ma dragée je risquai néanmoins une interrogative:

  • Comment j’le garde? Si j’le mets dans ma poche j’vais l’casser.
  • Sûrement pas! Attends…

Elle se leva, et se servant de sa chaise comme d’un marche-pied, grimpa sur la table. Ses vertigineuses cothurnes martelaient le Formica à quelques décimètres de ma face. Troublé, je laissai aller mon esprit à ses penchants fétichistes. Lacés des orteils jusqu’au haut de la cheville, ces écrins rouge cerise brodés de fleurs ne pouvaient renfermer qu’un trésor. En équilibre plus que précaire sur ses pointes, elle parvînt du bout des doigts à prélever un peu du cumulus amarré à l’océan d’Ether. Je me levai, et lui proposai ma main afin de l’aider à descendre de son Olympe. Comme ses bottines touchaient de nouveau terre ferme, elle me tendit le morceau de nuage.

  • Lorsque tu ne joues pas avec, protège-le avec ça. Il faut que tu t’en occupes quotidiennement. L’idéal serait que ça devienne une manie, un tic.

Je saisis la vaporeuse ouate.

  • Ok, admettons, j’arrive à l’faire éclore… Tu penses sincèrement qu’ce colibri va m’aider à r’trouver mon envergure?
  • Sois en sûr! Me dit-elle les yeux gorgés de malice.

Alors que je disposai précieusement l’Elena dans son écrin séraphique, se penchant vers moi, de deux doigts Maria entrebâilla le col de son chandail et y glissa doucement sa main. Je la dévisageai du coin de l’oeil, n’osant rien dire, ni même envisager la suite. Après quelques instants elle dégagea son poing de l’enivrante vallée, et à hauteur de poitrine, en desserra l’étreinte. Apparut alors, bourdonnant à la surface de sa paume, un minuscule oiseau pas plus gros qu’un ongle. À la dérobée, elle saisit son verre, et lui présenta en l’inclinant de manière à ce que le vin se trouva tout à fait au bord. Après quelques ellipses, le colibri y introduisit son long bec et s’abreuva, d’une goutte tout au plus. Il s’échappa ensuite, et alla virevolter à l’à-pic de sa nuque, s’amusant de sa chevelure rassemblée au sommet de son crâne. Elle me regardait, son regard pétillait plus que jamais.

  • Sois en sûr… Me dit-elle à nouveau.

Tandis que Lee Morgan de son Sweet honey bee m’étourdissait l’ouïe, j’enfouis la vaporeuse ouate dans la poche de ma veste et m’affaissant sur ma chaise, sirotai le nectar en me laissant bercer le regard. Après s’être assuré que la chevelure de Maria ne présentait plus aucun impair d’ordre esthétique, le colibri voleta à travers la pièce, et inspecta avec minutie chacun des éléments ou objets qu’elle comptait.

Nous passâmes le reste de la soirée à bavarder. Du Clos Marion aux Nuits St Georges, nous y passâmes à vrai dire la nuit. Sur le pas de la porte, alors que déjà le jour s’apprêtait à pétrifier les songes, je pris congé de son admirable compagnie, par une accolade fraternelle bouffie de bons sentiments. Je levai une dernière fois les yeux au plafond. Il n’était plus. Ou plutôt, il était devenu immense. Les lézardes qui le déchiraient, l’avaient absorbé. Au loin, mon petit nuage s’étirait en cirrus comme une goutte de lait dans le café du matin.

L’gui
juin 2014

L’ETAT N’EXISTE PLUS !

Ma Chère Myriam,

Loin de moi l’intention de t’accabler de mes questionnement juvéniles, complotistes, absurdes, paradoxaux ou tout simplement idiots. Il n’empêche qu’une fois encore, il y a cette question qu’il me plairait de soumettre à ta synaptique mécanique.

Bien que la douceur de la vie me grise et que ma misanthropie galope, il m’arrive parfois de brièvement toucher la satisfaction. Ce sentiment d’être à sa place exactement. Ce soir-là dans mon fauteuil club, buvant, fumant, le combiné de mon Socotel à l’épaule, ce soir-là, je frôlais le contentement. Je discutaillais avec Sasha G.* de bouffe,  de cul, d’institutions européennes et de régulation de marchés. Notre échange des plus délectables devint quasi jouissif, lorsque naquit de sa bouche cette langoureuse affirmation : « Mais Guillaume, l’Etat n’existe plus! »

Cocasse pour une aspirante à Science Po Paris, tu en conviendras, mais il me tarde d’autant plus de connaître l’analyse de l’aficionada du droit constitutionnel que tu es, garant de l’existence dudit Etat. Ainsi je me permettrais de reformuler ce lyrisme sans concession sous la forme interrogative, plus propice peut-être à la discussion :

«L’état existe-t-il encore?»

Au vu de ce vaste chantier, de ce pavé dans la mare, que dis-je dans la mer! Tu imagines aisément le branle bas de combat dedans ma caboche lorsque ces mots vinrent me claquer le tympan!

L’Etat, qu’est-ce que c’est? De quel Etat parle-t-on? De la France, de l’Europe? Une autorité législative issue d’une constitution démocratique?

Exister… Comment existe-t-il? Où existe-t-il? Quelles sont les preuves de son existence? Comment ça il n’existerait plus? Peut-il être sans pour autant exister? Ca chauffe, ça chauffe, je me calme.

Pourtant, cet Etat est bien réel, lorsqu’il impose la Rigueur à ses citoyens. Lorsque par son action de législateur, des millions de familles se retrouvent dépouillées, envasées dans la pauvreté, il existe là l’Etat! Peut-être s’agirait-il du lieu, du champ d’action? L’Etat existerait pour ces citoyens lambda, pour la plèbe, mais pour les grands de ce monde, son existence serait moins évidente? Ce qui me renvoit à Jean-Michel Naulot* qui lui aussi, comme Claire, affirme que l’Etat, les politiques ont laissé le terrain libre aux acteurs des marchés. Qu’ils leur ont délégué le pouvoir sans aucune contrepartie. (Je n’ai pas la citation exacte, mais m’engage à la retrouver dès que Claire m’aura rendu mon foutu bouquin!) Et c’est là, que même si je ne veux pas jouer au plus finaud avec Naulot,  quand la BCE (Banque Centrale Européenne) en baissant au minimum les taux directeurs, donne de l’argent gratuit aux spéculateurs, en gros refile du savon aux faiseurs de bulles, ceux-là mêmes qui prescrivent la rigueur comme remède à tout: il existe bien là aussi l’Etat, le politique, même dans ce no law’s land que sont les marchés financiers.

Donc premier constat rassurant: ouf! l’Etat existe toujours… Certes il semble pour le moins partial et très peu représentatif de ce que j’appellerais une volonté démocratique mais puisqu’il vole les uns pour redistribuer aux autres, sorte de Robin des Bois bipolaire, il est et existe!

Ainsi ma chère Myriam, même si je ne suis qu’un gueux, il semblerait que notre amie Sasha à force de gavage intellectuel, s’en est faite confire l’encéphale à la façon d’une oie. Car de toute évidence, en tricotant vite fait le fil de son idée, séduisante au demeurant pour un anar’ de mon espèce, on se rend vite compte que notre canette provinciale fraîchement montée à la grosse ville a beau se donner des airs d’érudite, elle est complètement à côté de sa mare.

A moins que, dans ma précipitation d’andouille, ce ne soit moi qui soit en train de barboter la poussière. Peut-être que par «L’Etat n’existe plus» notre clairvoyante anatidé, loin d’annoncer la mort de l’Etat en tant qu’institution des pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif, me désignait sa déchéance, l’abandon de sa souveraineté, sa capitulation sans condition.

En effet l’Etat, d’un point de vue purement administratif, et ce malgré les hordes condescendantes d’incompétents concupiscents qu’il comporte, je le concède et surtout le confesse, ça marche. Ça massacre du manifestant, ça collecte de l’impôt, ça instruit et soigne a minima les gueux afin d’éviter les épidémies trop virulentes et la pertes massives connexes de chair productive, ça divise, ça communautarise, en gros ça bosse, mais ça bosse pour qui? Pour qui roule un Etat? Une monarchie, ça roule pour le roi, un empire pour l’empereur, une tyrannie pour le tyran, etc… Et une démocratie ça roule pour le peuple! Plus précisément les citoyens. Dans une démocratie le peuple est, à travers l’Etat qu’il nomme, souverain! Grosso merdo, c’est le principe! Donc, parce-que construit sur un modèle démocratique, l’Etat français et les institutions européennes devraient en toute logique rouler pour le peuple. Et c’est là, tu l’auras compris ma chère Myriam, qu’on a comme qui dirait mis le doigt sur la couille dans l’potage, et mon flair me dit : « Cesse de barboter, tu le tiens ton petit souci de souveraineté, ou plutôt d’exercice de la souveraineté. »

Car si toute démocratie a, par essence, tendance à glisser vers l’oligarchie  (pouvoir réservé à une classe dominante), c’est bien, de fait, aux règles d’une ploutocratie (pouvoir réservé aux plus riches) que notre Etat obéit. (Etat = France, Europe, Occident, je colle volontiers tout ça dans l’même sac! Appliquant les préceptes du principe juridique : Vu que ça m’arrange, on dirait que j’aurais raison.)

Une fois encore, ouf!… Contrairement à l’affirmation de mon acolyte de tergiversations sous psychotropes , l’Etat existe encore! C’est juste qu’il serait vraiment temps qu’il fasse son coming out. C’est un peu comme un trav’ obèse du bois de Boulogne qui aurait loupé sa dernière séance d’épilation. Même avec le rouge à lèvres, on la sent ambiguë, on se méfie, y a comme un truc chelou qui dépasse…

L’Etat existe plus que jamais! Et c’est une bonne vieille grosse ploutocratie qui pathétiquement tente encore de se déguiser en belle et plantureuse démocrate.

Alors tu vas me dire : «Tout ça pour ça… Bon et puisque que t’es capable de trouver tes réponses tout seul, comme un grand, pourquoi venir m’emmerder avec tes considérations politiques de comptoir!?»

 

Et bien ma chère Myriam, c’est justement pour élever un temps soit peu le débat à l’abreuvoir que je fais appel à ta luminescence! Parce-que la médiocrité m’emmerde et la mienne plus que toute autre, parce-que je ne me sens pas toujours à ma place dans ces sabots de bœuf, et parce-qu’à défaut de me rendre libre, si je pouvais au moins briller devant mes congénères bovidés, peut-être toucherais-je l’espoir d’une herbe plus verte, et de vaches plus douces.

 

L’gui

*Bien qu’il n’y ait dans ce bouillon fantastique qu’un soupçon de vérité. « Sasha G. » n’est pas (hélas) le vrais nom de mon amie, qui parce qu’elle n’aime pas les oies a préféré garder l’anonymat. (PS: Bisous Claire!) 

Références: Jean-Michel NAULOT, Crise financière, pourquoi les gouvernements ne font rien, Seuil

Pistes:  Etats off-shore des magnats de la silicone valley 

PRINCIPE JURIDIQUE ou Pourquoi la loi que nul n’est censé ignorer n’est-elle enseignée qu’à une élite?

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Ma chère Myriam,

Je souhaiterais te faire part d’une question qui me turlupine l’occiput depuis moult déjà.

Avant de solliciter tes lumières, qui risquent fort, je le crains, d’auréoler ma turpitude, je me suis un peu renseigné. (pas beaucoup mais un peu) Afin que les éventuels éléments de réflexion qui pourraient éclore dessous mes pariétaux puissent s’agripper à quelque chose, il m’a semblé nécessaire de définir l’adage à l’origine de ma surchauffe encéphalique, «Nul n’est censé ignorer la loi»

Adage qui loin d’être un fantasme populaire est apparemment constitutif de l’application du droit! (Nemo censetur ignorare legem = personne ne peut invoquer l’ignorance qu’il a de la loi pour échapper à son application)

Traduit dans l’article 1er alinéa 3 du code civil dans sa rédaction de 1804 (« La promulgation faite par le Premier Consul sera réputée connue dans le département »…) représente, selon Maître Gros, Avocat au barreau de Chambéry (oui, je l’ai un peu choisi pour son nom…) « (…) une fiction juridique majeure pour l’équilibre social, soit un principe dont on sait la réalisation impossible, mais nécessaire au fonctionnement de l’ordre juridique.»

Grosso merdo, on sait très bien que c’est pas vrai, mais comme ça nous arrange bien, on dirait que c’était vrai quand même. Et de plus, on va tout miser là-dessus pour établir les règles de notre société!

C’est un peu comme si on considérait soudain que tout les êtres humains étaient nyctalopes afin de réaliser des économies d’énergie. Ou encore, c’est comme si j’avais pas une tune, mais comme c’est nécessaire à mon bon fonctionnement, on disait que j’étais blindé.

Forcément, en basant la pensée juridique sur ce genre de principes, on comprend mieux l’impudence des états à proclamer des trucs du genre:

«Bon, on sait bien qu’il n’y a pas d’armes de destruction massive en Irak, mais vu qu’on a besoin de la guerre pour le bon fonctionnement de notre industrie, on dira qu’il y en avait quand même.»

ou alors,

«Ecologiquement, on sait tous qu’on va droit dans le mur, mais vu que c’est nécessaire au bon fonctionnement de notre sacre sainte économie, on dira qu’on allait pas tous crever.»

Bref, un principe juridique, ma chère Myriam, si j’ai bien pigé, c’est un truc que tout le monde sait irréel, mais que tout le monde considère comme acquis et sur lequel on fait tout reposer. En gros le droit comme il est conçu dans nos sociétés dominantes, ne serait ni plus ni moins qu’un gros tas de caillasses qui flotterait sur un océan d’eau douce, parce-que le principe d’Archimède c’est pour les tapettes…

Bon, tu me connais, je suis plutôt ouvert comme type, alors même si c’est un peu capilo-tracté, pourquoi pas, admettons.

Mais, vu le poids de l’entreprise, serait-ce vraiment trop demander que ces improbables fondations soient consolidées d’un soupçon de vraisemblance? C’est vrai quoi, même le père Noël avec ses lutins, son traîneau volant et son renne qui fait de la lumière avec son tarin est plus crédible que le principe foireux de «nul n’est censé ignorer la loi» (sur lequel est basé le droit positif!)

  1. Le père Noël, on ne demande qu’aux enfants d’y croire
  2. Tu risques pas d’aller en tôle parce-que t’as cramé la dinde.
  3. La majorité de mes contemporains en savent plus sur ce gros bonhomme rouge que sur les lois auxquelles ils sont soumis. (ce dernier point n’étant certes, qu’une appréciation toute personnelle…)

Donc ma chère Myriam, pour filer la métaphore, ne pourrions-nous pas, par exemple, diluer ne serait-ce qu’une pincée de sel dans l’océan d’eau douce qui est censé assurer la flottaison de notre édifice? Pour que, avec beaucoup d’imagination, dans un monde merveilleux avec des dragons, des fées, et toute la smala, cette histoire de cailloux qui flottent semble,… envisageable?

Parce-que ok, aucun homme ne pourra jamais avoir connaissance de l’ensemble des règles de droit, pourquoi ne pas essayer que la majorité des bonshommes qui forment notre si brillante civilisation, en détiennent au moins quelques clefs?

En tant qu’étudiante et déjà plus que tu ne le crois vendue à la cause, peut-être tu me répondras:

«C’est possible mon chère Guillaume, mais pour cela, il faudrait utiliser l’arme maléfique! Et ça, tous s’y opposeront. Pour réaliser ce rêve idyllique, d’un monde où les bestioles qui le peuplent sauraient à peu près à quelle sauce elles seront mangées, il n’y a d’autre choix que de dégainer la papesse des épées, mère de l’insoumission et des remises en question les plus profondes, l’arme de destruction massive de l’ordre établi. Car cette «pincée de sel» dont tu parles innocemment, s’appelle en réalité «l’éducation». Et je ne pense pas que tu puisses réaliser les enjeux et les conséquences de l’utilisation d’une telle arme. Son pouvoir est bien plus immense que tu ne peux le concevoir. Une magie si puissante, ne peut et ne doit pas, tomber dans les mains de la plèbe. (Déjà que l’érudition à la lecture et à l’écriture, a causé ces dernière décennies, bien du tracas en haut lieu. Par chance, avec la démocratisation de la technologie, ce problème semble en voie d’être maîtrisé) Pourquoi tout remettre en cause, alors que cela fonctionne si bien ainsi? De plus, si tu y réfléchis, sincèrement,  es-tu sûre de vouloir savoir à quelle sauce tu vas être mangée?»

Mais je fabule et ce n’est pas très cool de ma part de te prêter la facétie des notables, sous prétexte que tu aies appris leur langage. Ainsi je finirai sur cette cuisante interrogation:

« Pourquoi la loi que nul n’est censé ignorer n’est-elle enseignée qu’à une élite? »

*Bisous!*

l’gui

Mon unique référence car je suis fumiste et l’assume:

http://www.grosetgros-avocats.fr/spip.php?article19

Où lʼheure dʼété passe-t-elle lʼété?

l'heure d'ete

Ce dimanche comme chaque année à cette période, nous allons passer à
l’heure d’été. C’est-à-dire que nous allons perdre une heure. Pendant la nuit
de samedi à dimanche à 2h du matin, il sera déjà 3h!  Cette heure convoitée
de la nuit, celle qui  permet aux fêtards de sereinement reprendre un dernier
verre, aux étoiles vacillantes de se laisser tenter par une dernière danse, ou
encore aux Cendrillons d’un soir de se faire raccompagner à leur carrosse,
ces décisives 60 minutes pendant lesquelles les destins se dessinent
et Cupidon décoche à l’aveugle ses volées, ces précieuses 3.600 secondes, à
2h pile, auront comme chaque année, mystérieusement disparu! Jetant dans
le désarroi les citoyens venus comme aux dionysies célébrer le bourgeon
de la rose à 2€, le brame du Jäggermeister, la fonte des cubes de glace, en
un mot, le printemps!

Et cela ne choque personne ! Bien sûr certains s’en agacent, d’autres s’en
complaisent autour de la classique fracture nécessaire au bavardage, le
stérile débat des pour et des contre. Avec, pour n’en citer que quelques
uns, les geignards : « C’est énervant leurs magouilles là, moi avec les
enfants, je mets une semaine à m’en remettre » ; les bienheureux : « moi
j’aime bien l’heure d’été, les soirées sont plus longues » ; les confus : « Moi,
je ne sais jamais si on avance ou si on recule » ; les inutiles : « oui mais en
hiver y fait nuit tôt quand même » ; les complotistes :  «  paraît que ça
économise l’électricité, encore un coup des écolos ça! » Mais pas un seul de
ces tailleurs de bavettes, discutailleurs de trottoir, pas un de ces jacasseurs
de palier, ou idéologistes du sens commun, ne s’interroge! Personne n’est
choqué que chaque année, au printemps, une heure disparaisse ! J’entends
déjà les cartésiens d’comptoir, se moquer, et me dire : « Mais qu’il est con
celui-là alors ! Tu t’inquiètes pour rien ! En automne, elle va revenir ton
heure ! »
Et si cette année elle ne revenait pas !? Si cette année alors que le soleil, las
de faire au maillot des pochoirs sur notre peau se sera éloigné ; alors
qu’avec impatience, j’attendrai la première longue soirée d’hiver pour
inaugurer mon nouveau plaid tout d’alpaga crocheté, cette petite heure
(dont je suis apparemment le seul à me soucier) ne réapparaissait pas !?
Ce n’est pas que je ne lui fais pas confiance. Elle a été jusqu’à présent, et
depuis bientôt un siècle, très rigoureuse quant à la date de son retour et ce,
à la  seconde près ! Mais tout de même, 6 mois de villégiature, c’est long !
On ne sait pas ce qui lui arriver en 6 mois ! Surtout qu’on ne sait même
pas où elle va pendant ces 6 mois ! Car je ne veux pas être alarmiste, mais
si pour une quelconque raison, elle se trouvait retenue, on ne saurait même
pas où aller la chercher !
J’entends encore ces bien-pensants ankylosés au j’en foutre : « Qu’est ce
qu’on s’en fout, une heure de plus, une heure de moins! Y en a des heures
dans une année, c’est pas une pauvre petite heure qui va nous
emmerder! » Mais justement! Il se pourrait bien qu’avec son mi-temps,
cette petite heure fasse des jalouses parmi ses 8.759 copines! Imaginez ce
que ça donnerait si toutes se revendiquaient soudainement de l’idée de
Franklin, et décidaient de passer l’été où bon leur semble! Il ferait nuit
noire à midi, plein jour à minuit, et je peine à m’imaginer le merdier! Et
contrairement à ce que pensent les incultes, ce ne serait pas la première fois
que l’on aurait affaire à un mouvement syndical dans le secteur! Depuis les
année de Numa à Rome alors que Jésus-Christ n’était pas près de crier, ce
genre de foutoir en a déjà fait trembler des Empires et pas de la supérette!
Alors c’est pas pour vous foutre les foies, mais je me permets tout de
même de rappeler qu’aujourd’hui encore, en plus de nos 8.760 gentilles
petites heures, on en a 24 de syndiquées qui, sous prétexte de réunions du
personnel, ne bossent qu’une fois tous les 4 ans! Et coïncidence opportune,
devinez quand elles reviennent bosser nos 24 rouges… En 2016! Pile le
centenaire de l’année où on a accordé à notre heure d’été ses 6 mois de
congé annuels… De quoi se laisser pousser les idées vous en conviendrez!
J’ose espérer que vous considérez maintenant de manière moins anodine la
disparition estivale de nos rebelles petites 60 minutes. Et c’est pourquoi il
me semble urgent, dans un premier temps, de répondre à cette légitime et
viscérale question: « Où l’heure d’été passe-t-elle l’été? »

Pour Giedré

 

Chère Giedré,

 J’ai découvert tes chansons sur l’internet il y a quelques jours et je les aime vraiment beaucoup, je pense d’ailleurs que nous avons beaucoup de choses en commun. C’est pourquoi je voulais t’inviter à MON ANNIVERSAIRE. Je voulais inviter aussi tous LES PETITS ENFANTS de LA BANDE À JACKY et je voulais venir te chercher avec LA PETITE CAMIONNETTE de tante HENRIETTE. Tu aurais chanté UNE JOLIE CHANSONon se serait raconté LES PETITS SECRETS et tu aurais été pour moi LA BELLE AU BOIS de la soirée.

 Oui mais voilà, lorsque j’ai demandé à MAMAN, elle m’a dit : « MON PETIT CHAT, MON PETIT LOUP, EST-CE QUE CA VAUT BIEN LA PEINE? Je ne me suis pas démonté et lui ai dit: «Maman, il ne faut pas se poser trop LES QUESTIONS. Il y a LES PRIORITÉS, la vie est courte et LA MORT NOUS ATTENDC’est pas parce-que j’ai une VIE DE MERDE que j’ai pas le droit au bonheur! Et Giedré elle est toujours AVEC LE SOURIRE très joli!» Maman m’a répondu : «contrairement à toi LES GENS SE BROSSENT LES DENTS et d’ailleurs LAVE TOI!» Ensuite, elle a continué à crier en disant que j’étais à moi tout seul «UNE ODE À LA CONTRACEPTION!» 

 J’ai pas bien compris, mais je sais que ce n’était pas très gentil, alors je l’ai menacé: «Si c’est comme ça, j’attendrai QUAND TU DORS pour PISSER DEBOUT sur toi!» Maman m’a claqué, et m’a dit: «CHUT! Maintenant, FERME TA GUEULE ET APPORTE MOI UNE BIÈREJE NE SUIS PAS MÉCHANTE MON CANARD, mais dans la vie c’est CHACUN POUR SOI et les filles sont TOUTES DES PUTES! Je veux seulement te protéger mon chéri.»

De l’entendre te traiter, mon sang est parti comme un écart du tour, et comme LA FENÊTRE était ouverte, je l’ai poussée en criant : «MEURS!» ET TOC ! Elle est tombée. Hélas en s’écrasant elle a aussi écrabouillé la petite camionnette de tata garée au pied de notre immeuble, avec tata dedans. 

 Alors je suis désolé, mais je ne pourrai pas venir te chercher pour mon anniversaire, mais si tu veux tu peux quand même venir. Sauf que maintenant j’ai déménagé, j’habite en prison.  Et d’ailleurs, j’ai enfin compris ta chanson sur L’AMOUR À L’ENVERS, depuis que je connais L’AMOUR EN PRISON. Moi ça va ça ne me dérange pas, je n’avais jamais connu l’amour à l’endroit de toute façon.

 J’espère que tu pourras venir à mon anniversaire, tu peux passer quand tu veux, plus personne ne sais quand je suis né maintenant.

 Je te fais des gros baisers en forme d’Uranus comme toi tu fais et comme disent les copains, SOIGNEZ L’PD!

                                                                                             XoX